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Petite enfance : « Nos revenus sont indécents ! »

Publié le 07/10/2020

Entretien avec Yoann Moreau, animateur petite enfance. Yoann travaille chez Graines de soleil à Brest, il est détenteur d’un CAP petite enfance. Il prépare une validation des acquis de l’expérience pour être éducateur.  

« J’ai toujours eu un bon feeling avec les enfants, j’ai travaillé dans des centres aérés entre 16 et 20 ans. J’ai été musicien professionnel pendant 20 ans. Pour stabiliser ma situation, l’idée de travailler avec les enfants s’est imposée à moi.

- Comment tu t’inscris dans l’équipe pluridisciplinaire ?

- Je travaille depuis 7 ans ici et je n’ai jamais senti de hiérarchie, on fait tous les mêmes choses, même si nos rôles apportent une diversité : en tant qu’animateur, je fais attention à ce que les enfants développent des activités variées. Au quotidien, on fait sensiblement les mêmes choses. Je fais une passerelle avec la musique : je fais énormément d’éveil musical avec les enfants, je marie mes deux passions en même temps.

- Quelle musique proposes-tu ?

- Il faut jouer de tout ! Sortir des comptines – elles sont présentes évidemment, mais le rap l’est aussi : on explore le champ des possibles. Je joue du piano et de l’harmonica sur place, et j’achète de petits instruments pour les enfants : maracas, tambourins, harmonicas.

- Combien d'enfants as-tu en charge ?

On travaille par « référence » : chaque professionnel a des enfants qui lui sont attribués. Je suis certains enfants depuis 2 ans, et on devient des interlocuteurs privilégiés. Nous sommes deux pour une dizaine d’enfants.

- Quelles sont les difficultés rencontrées ?

- Les revenus sont indécents par rapport au temps et aux responsabilités qu’on a !

- La présence d’un homme surprend-elle ?

- Les schémas familiaux ont beaucoup évolué. Beaucoup de pères viennent déposer et chercher leur enfant. Je pense que c’est facilitateur pour les hommes, quand ils entrent dans ce monde très féminisé : ce n’est pas évident d’arriver là-dedans, où les femmes sont les « sachantes ».

- Qu’en est-il de l’évolution de la parentalité ?

- On voit de plus en plus de jeunes mères seules. Je fais parfois office de référent masculin pour ces enfants dans leur construction, même s’il faut savoir garder la bonne distance. On n’est jamais un père de substitution. On fait office d’aide à la parentalité.

J’ai recroisé la maman d’un petit garçon que j’avais suivi. Elle m’a dit qu’elle était contente que ce soit un homme qui se soit occupé de son petit garçon, car laisser son bébé à une autre femme avait quelque chose de culpabilisant pour elle. Du fait que je suis un homme, cette forme de compétition n’existait pas. »